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samedi 30 juin 2012

Les limites sont franchies...

Le mot « décroissance », un « suicide politique » pour Dennis Meadows



De la boue séchée (Sumson/Flickr/CC)
A l’heure où la planète a rendez-vous à Rio pour parler d’« économie verte », la voix de Dennis Meadows mérite d’être écoutée. Environnementaliste américain, il était chercheur au MIT (Massachusetts Institute of Technology) et âgé de seulement 30 ans lorsqu’il a publié, avec ses collègues, en 1972, le rapport sur « Les Limites de la croissance », à la demande du Club de Rome.
Modèle complexe
L’équipe du MIT a modélisé un système très complexe, à savoir l’humanité. Parmi les dizaines de variables : la population globale, la superficie cultivable par individu, les ressources naturelles restantes, le quota alimentaire par personne, la production industrielle par tête, le capital industriel global, le niveau de pollution.

Ils définissent ainsi l’empreinte écologique de l’humanité par rapport à la capacité de charge de la Terre.
Au beau milieu des Trente Glorieuses, ce texte devenu un best-seller créa un choc dans le monde développé. Pour la première fois, d’éminents spécialistes des systèmes complexes avaient modélisé l’humanité et son développement, et prévenaient que des limites écologiques physiques viendraient freiner cette expansion.
Sa réédition augmentée en français, quarante ans après (éditions Rue de l’Echiquier), est saisissante car on s’aperçoit de la capacité de prédiction de ces modèles.
Une croissance soutenue ne peut être l’horizon de l’humanité, affirme-t-il encore aujourd’hui. La crise financière en est pour lui le symptôme, de même que le Printemps arabe. Entretien.
Rue89 : Pensez-vous être écouté par les dirigeants actuels ou seulement par les écologistes convaincus ?
Dennis Meadows : Je vois rarement mes propos faire changer des situations, même s’il est vrai que beaucoup de gens viennent me voir avec un exemplaire de mon livre de 1972 en me disant qu’il a « changé leur vie ». Les actuels ministres de l’Environnement ont lu mon livre il y a quarante ans, et ça les a influencés.
Aujourd’hui, il faudrait des changements drastiques de comportement, or la tendance naturelle des politiques est de chercher à résoudre le problème immédiat en faisant des changements marginaux.
C’est ce qu’on voit à Rio où convergent 50 000 personnes, sans aucune utilité.
Vous conseillez aux gens de ne pas aller à Rio ?
Je ne dis pas ça. Mais la plupart des sujets importants discutés à Rio ont été préparés en amont, les discussions constructives ont eu lieu avant. A Rio, vous avez deux types de personnes :
  • les représentants des gouvernements, qui vont là bas pour être sûrs que rien n’arrive qui pourrait compromettre leurs intérêts nationaux ;
  • d’innombrables ONG, ou des gens intéressés par le développement ou les ours polaires… Pour eux, Rio est une opportunité de « réseauter », de rencontrer des gens.
Moi je suis un scientifique, pas un politique, je n’ai rien à faire là-bas. Si j’étais dans le milieu environnementaliste, je pense que je serais enchanté de passer du bon temps à Rio. A ceux-là, je veux juste dire : n’imaginez pas que les choses importantes se passent lors des réunions officielles.
Que vont faire les gouvernements à Rio alors ?
Dès que vous devez faire des déclarations communes à plus de cent pays, il n’y a rien de simple. Ne croyez pas que de nouvelles politiques peuvent émerger de Rio. Tout a été discuté en amont, il ne peut y avoir que des déclarations convenues.
Pensez-vous que la crise actuelle peut pousser les gouvernants à agir pour l’environnement, ou va au contraire les freiner ?
Nous sommes face à un dilemme sérieux : la crise financière pousse les politiques à avoir des perspectives de très, très court terme – ils doivent éviter le naufrage des banques pour le mois prochain – alors que la préservation de l’environnement exige des perspectives de très long terme. C’est une spirale destructrice : plus nous agissons pour le court terme, plus la crise de long terme s’aggrave.
Etes-vous plus pessimiste qu’il y a quarante ans ?

« Les Limites de la croissance » de Dennis Meadows
Il y a deux fois plus d’habitants qu’il y a quarante ans, et le niveau de vie a augmenté, donc on met plus de pression sur la planète.
Le CO2 est un bon exemple : tout le monde admet que les émissions doivent baisser mais elles ne cessent de monter, et l’an dernier, elles ont été plus élevées que jamais. Pourquoi ? Parce que personne ne veut faire de sacrifices de court terme pour des bénéfices de long terme.
Avez-vous souffert de la marginalisation après la publication de votre rapport en 1972 ? Et aujourd’hui encore ?
Au début des années 70, des économistes ont essayé de discréditer mes analyses car elles leur semblaient importantes. Maintenant, ils les ignorent simplement.
Mes opposants ont tout fait pour détourner l’attention du message principal : ils ont sorti du contexte mes données, ou tenté de dire que j’étais acheté par des gens qui voulaient bâtir un gouvernement mondial (regardez sur le Web tout ce qu’écrivent les conspirationnistes).
Désormais, il y a des centaines de rapports qui confirment ce que je dis depuis quarante ans.
Mais pourquoi n’êtes-vous pas écouté si vous avez raison depuis quarante ans ?
Prenez la Grèce, son niveau de vie est en train de baisser. Aux Etats-Unis, la classe moyenne a vu son revenu diminuer depuis vingt ans, ce n’est pas de la fiction.
Supposons que nous nageons, que je mets votre tête sous l’eau et je vous parle du changement climatique : vous vous en fichez du climat, à court terme, vous voulez juste respirer.
Pourquoi estimez-vous que le « développement durable » n’est plus un bon concept ?
Il y a plus de cent définitions de ce terme, et aucune ne fait autorité. La définition la plus courante est : « Satisfaire nos besoins d’aujourd’hui sans compromettre les possibilités des générations futures de faire face à leurs propres besoins. » C’est fantaisiste. Comment donner aux gens plus aujourd’hui sans compromettre demain ?

Dennis Meadows à Tokyo, en avril 2009 (KAZUHIRO NOGI/AFP)
Ceux qui utilisent le terme « développement durable » le font juste pour justifier ce qu’ils vont faire de toute façon. La croissance verte, c’est juste un moyen de justifier la croissance.
Allez demander aux pauvres : ils vous diront que le développement durable, ça veut dire que les riches vont réduire leur train de vie. Allez demander aux riches : ils vous diront que ça veut dire que les pauvres vont arrêter de faire autant d’enfants...
Regardez Rio : quelle attention va être prêtée à la question de stabiliser la population mondiale ? Aucune. Vous ne pouvez pas avoir une espèce humaine durable si elle continue de croître à l’infini.
Certains projettent, sur la base de modèles pas très fiables, que la population va se stabiliser à neuf milliards, mais on est déjà à plus de sept ! Comment imaginer que les riches vont continuer à avoir autant qu’aujourd’hui et que les pauvres vont rattraper leur niveau de vie sans abîmer le système ? C’est insensé.
Il n’y a pas de preuve empirique que l’on peut découpler la croissance économique des dégâts faits à la planète. On peut faire un peu moins de mal, mais pour avoir une planète soutenable, il faut une croissance négative.
Vous me faites penser à Tim Jackson, que nous avions interviewé sur ce sujet. Mais lui préconise des investissements massifs dans les énergies propres. Pas vous ?
Attention aux résumés simplistes de ce qu’il dit. Bien sûr que c’est important, alors que nous allons manquer de pétrole, d’investir dans les énergies renouvelables. Mais on a besoin de plein d’autres choses : protéger les ressources en eau, modifier l’agriculture... Les énergies renouvelables ne produisent que de l’électricité, alors que nos principaux besoins en énergie concernent les transports. On ne fait pas encore voler les avions à l’électricité que je sache !
Vous vous définissez comme « malthusien » ?
Ses idées étaient valables : la population croît de manière exponentielle tandis que la production de nourriture croît de manière linéaire. Disons que l’Histoire ne lui a pas donné tort. Mais Malthus n’a pas décrit de solutions, seulement des phénomènes, et puis c’était il y a 300 ans.
En France, on a le mouvement de la décroissance. Vous revendiquez-vous de ce bord-là ?
C’est un terme horrible. Les idées sont bonnes, les perceptions de la réalité qui amènent à vouloir décroître sont excellentes, mais le terme lui-même est un suicide politique, il est totalement négatif.
J’ai une amie japonaise qui veut démarrer un mouvement de décroissance, elle a appelé cela le « centre du bonheur humain et des systèmes alternatifs ». C’est exactement la même chose mais ça passe beaucoup mieux !
Je suis rarement aussi tranché dans mes jugements, mais là je suis absolument certain qu’en tant que mouvement public, il ne pourra pas avoir d’influence s’il utilise ce terme. Regardez Rio : tout est concentré autour de la croissance, qui parle de la décroissance comme solution ? Personne !
C’est peut-être incompatible avec la nature humaine d’imaginer revenir en arrière…
L’humanité est sur cette planète depuis 300 000 ans et jusqu’à il y a cinquante ou soixante ans, la croissance n’était pas un sujet. Aux XVIe, XVIIe, XVIIIe siècle, vous naissiez dans une famille et vous espériez avoir le même niveau de vie que vos parents, avoir le même statut social... La croissance est une idée très récente !
Vous écrivez que l’on a utilisé plus de 150% des ressources de la planète. Comment faire comprendre cela aux gens ?
Ce ne sont pas mes chiffres, ce sont ceux de Mathis Wackernagel, le concepteur de l’empreinte écologique mondiale. Pour mieux expliquer, je prends souvent l’exemple du compte en banque : vous avez économisé beaucoup d’argent et votre compte est très plein, mais vous pouvez le vider très vide. C’est ce qu’on fait : on épuise très vite les ressources, par exemple fossiles, qu’on a mis des millénaires à accumuler.
A votre avis, si l’humanité venait à changer, cela viendrait plutôt des pays du Nord ou du Sud ?
La situation actuelle me fait penser à « Tragedy of the commons », un article devenu un classique. Dans les temps anciens, il y avait au milieu du village un « common », un pâturage pour tout le monde. Si chacun met ses vaches dessus, plus personne ne pourra pâturer.
C’est ce qui se passe avec l’empreinte écologique. Prenons les ressources halieutiques : chaque pays peut devenir plus riche à court terme, mais quand la ressource sera épuisée, plus personne ne sera riche.
Nous sommes « addicts » à la croissance ; cela a-t-il une chance de changer ? N’est-ce pas trop tard ?
En théorie, ce n’est pas trop tard, mais en pratique si. Ce n’est pas la nature de l’être humain de désirer toujours plus, mais c’est comme ça qu’il se comporte. Nous avons bâti ce système économique basé sur la consommation sans limite, avec la publicité qui vous donne envie de cela et la banque qui vous pousse à emprunter et les gouvernants qui creusent la dette... Je ne pense pas que cela va changer.
Sophie Verney-Caillat

vendredi 29 juin 2012

Nos Centrales atomiques dans un triste état...

Le parc nucléaire français à l'heure des "travaux massifs" après Fukushima

PARIS - Fukushima est "en fait, devant nous" : l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a détaillé jeudi le calendrier des "travaux massifs" obligatoires pour sécuriser les centrales françaises.
Le "gendarme français du nucléaire", s'appuyant sur les conclusions de son audit post-Fukushima de janvier, impose notamment à EDF la création d'une "force d'action rapide" d'ici 2014 et, à plus long terme, d'un "noyau dur" dans chaque centrale permettant de limiter les conséquences d'un éventuel accident.
"Beaucoup pensent que Fukushima est derrière nous, mais c'est, en fait, devant nous", a résumé le directeur général de l'ASN, Jean-Christophe Niel, en marge d'une conférence de presse à Paris.
L'ASN a adopté 32 décisions portant sur 19 centrales exploitées par EDF, mais aussi 8 sites d'Areva (liés au combustible) et 5 sites du Commissariat à l'énergie atomique (CEA, pour le volet recherche).
Après l'accident de Fukushima, en mars 2011, l'ASN avait analysé le niveau de sûreté des installations françaises et en avait conclu qu'aucune centrale ne devait être fermée mais qu'il fallait en accroître la "robustesse".
Ces "travaux massifs" vont prendre plusieurs années, selon un "échéancier raisonnable", a précisé le président de l'ASN, André-Claude Lacoste.
La "force d'action rapide", un dispositif d'urgence permettant d'envoyer des équipes spécialisées et du matériel sur un site en moins de 24 heures, devra être capable d'intervenir sur un réacteur fin 2012 et sur tous les réacteurs d'une même centrale fin 2014, souligne l'ASN.
Facture évaluée à 10 milliards d'euros
Dans le cadre de l'élaboration d'un "noyau dur" dans chaque centrale, c'est-à-dire des locaux bunkerisés et des procédures renforcées adaptées à des situations de crise, l'ASN exige un système d'alimentation supplémentaire de sécurité par réacteur, au plus tard en 2018. Et un dispositif temporaire, plus léger, doit être installé d'ici un an.
Pour l'ensemble des travaux, EDF a évalué la facture à environ 10 milliards d'euros, a rappelé M. Lacoste, jugeant ce chiffre "pas invraisemblable".
EDF, dans un communiqué, a indiqué avoir "d'ores et déjà engagé un plan d'action" pour se conformer aux prescriptions.
Areva a souligné avoir remis à l'ASN "ses propositions techniques et d'organisation visant à renforcer la sûreté de ses sites en cas de situation extrême".
Greenpeace se pose pour sa part la question de "la pertinence de tels investissements" alors que "le nouveau président de la République a promis de faire baisser la part du nucléaire dans le mix électrique d'ici 2025".
Le président de l'ASN, lui, a évoqué un autre "point embarrassant" : le fait qu'il faudra peut-être 10 ans pour connaître le fin mot de Fukushima.
"Nous avons évidemment le devoir de prendre dès que possible des décisions pour améliorer la sûreté mais nous sommes amenés à les prendre sans être totalement sûrs d'avoir compris ce qui s'est passé", a indiqué M. Lacoste.
Concernant par exemple le fait, admis pour le moment, que seul le tsunami a provoqué la catastrophe alors que les installations ont, elles, bien résisté au séisme, le 11 mars 2011 : "à vérifier" pour le patron de l'ASN.
L'ASN, qui a par ailleurs dressé le bilan de ses inspections de 2011, a qualifié l'année d'"assez satisfaisante" en France.
Avec toutefois deux mauvais élèves en ce qui concerne les centrales : Chinon (Indre-et-Loire), "en retrait" en matière de radioprotection, et surtout Saint-Alban (Isère), en "queue de peloton" depuis plusieurs années.
Le Réseau Sortir du nucléaire a d'ailleurs évoqué jeudi une "grave lacune de sûreté" sur les réacteurs de trois centrales, dont Saint-Alban, pointant les possibles conséquences en cas de séisme. EDF a reconnu des "défauts" mais assuré qu'il "n'y a pas d'enjeu d'atteinte à la sûreté".

mercredi 27 juin 2012

La Forêt : poumon du monde...

Brésil: La ferme du monde contre le poumon de la planète

SOMMET RIO+20 - Au Brésil, la déforestation est liée aux immenses exploitations agricoles, qui ne nourrissent pas la population brésilienne...

On l’a surnommé «la ferme du monde». Le Brésil est devenu, en quelques années, le deuxième producteur mondial de soja et un leader des agrocarburants, en particulier de la production d’éthanol à partir de canne à sucre. Mais les 22% du PIB brésilien issus du secteur agroindustriel en 2011 ont été obtenus au détriment de la forêt amazonienne et des petits paysans, qui nourrissent les Brésiliens et pas leurs voitures.

Le Club Med et les Amap

Au Brésil, les petits agriculteurs représentent encore environ 70% du marché alimentaire national. Mais pour Yvonnick Huet, directeur général d’Agrisud International, «Les petits paysans sont exclus des circuits économiques par les plus grands acteurs». Ils se retrouvent alors confrontés à un choix: partir vers les favelas dans l’espoir d’y décrocher un petit boulot mieux rémunéré en ville ou bien trouver des débouchés différents leur permettant de mieux valoriser leur production.
Parmi ceux-ci, l’association Rede Ecologica organise des distributions de paniers de fruits et légumes à Rio. «Tout ce que nous proposons est bio et provient de la région», explique Tatiana, membre de l’association. Agrisud a pour sa part mis son expérience dans l’agroécologie au service de dix-huit producteurs de fruits et légumes qui approvisionnent depuis six mois le Club Med de Rio. «Notre rôle est de les aider à saisir cette opportunité, explique Yvonnick Huet. Nous rapprochons les deux parties et elles peuvent ainsi nouer une relation durable.» Pour cela, il a fallu s’adapter aux exigences du client, en termes de quantité et de qualité, sans oublier d’y apporter la touche de respect de l’environnement et de développement local qui représente la vraie valeur ajoutée du produit. Les producteurs se sont donc organisés en coopérative et ont suivi des formations à l’agroécologie. «Cela permet de faire accepter un prix un peu plus élevé au client», justifie Yvonnick Huet.

Deux ministères de l’agriculture

Maintenir ces petits paysans en activité ne permet pas seulement de les faire vivre eux, mais aussi d’alimenter tout le pays. Le programme «Fome zero», lancé il y a dix ans par le gouvernement brésilien pour éradiquer la faim, s’est beaucoup appuyé sur eux. Et avec succès: la malnutrition infantile a été réduite de 61 % et la pauvreté rurale de 15 %, selon une étude d’Oxfam. Malgré cela, l’agroindustrie continue d’avoir les faveurs du gouvernement. Symptôme de la rupture entre l’agriculture intensive et les paysans, le Brésil a deux ministères de l’Agriculture: le plus important est en charge de l’agriculture, de l’élevage et du ravitaillement, l’autre du Développement agraire. Le premier est aux mains du secteur agro-industriel, le second tente d’aider les petits producteurs.
Les grands propriétaires fonciers ont été montrés du doigt après le vote du nouveau code forestier, qui réduit la protection de la forêt. «Ils sont néfastes, et tout le monde le sait, s’indigne Dante Tavares, du WWF Brésil, mais ils ont la main mise sur une grosse partie de l’économie nationale.» On les laisse donc couper la forêt pour cultiver du soja et des agrocarburants ou élever des bovins, à grands coups d’OGM, de pesticides et avec un bilan environnemental désastreux.
Audrey Chauvet

dimanche 24 juin 2012

Rio : le courage politique , ce sera pour dans 50 ans...


Rio+20: Le sommet du futur «que nous ne voulons pas»


SOMMET DE LA TERRE - La déclaration finale qui sortira du sommet de Rio est rejetée par les ONG qui dénoncent un recul grave dans les engagements des Etats...

De notre envoyée spéciale au Brésil,
L’ancienne ministre de l’Environnement brésilienne, le président du WWF International, celui de Greenpeace, et de nombreuses autres personnalités ont rejeté ce jeudi l’issue du sommet des Nations Unies sur le développement durable. Alors que Rio+20 devait permettre de mieux prendre en compte le développement durable dans les politiques économiques et sociales, les ONG dénoncent en bloc un texte vide de substance qui oublie qu’il est urgent d’agir.

Textes sévères mais manifestations bon enfant

Le texte signé par les délégations des Nations unies, baptisé «Le futur que nous voulons», a été rebaptisé «Le futur que nous ne voulons pas» par les ONG. «Le futur que nous voulons est fait d’engagements, d’actions, et tient compte de l’urgence à freiner la crise sociale, économique et environnementale, pas à la reporter. Rien de tout cela ne figure dans les 283 paragraphes du document officiel qui sera l’héritage de cette conférence», écrivent les ONG.
Mercredi, entre 20.000 et 50.000 manifestants ont arpenté les rues de Rio de Janeiro pour dénoncer, entre autres, l’économie verte que le sommet Rio+20 a mis au cœur des négociations. Mais on était très loin des manifestations musclées qui ont eu lieu à Copenhague en 2009: un faux char d’assaut fabriqué avec du pain, des Indiens portant un tronc d’arbre sur le dos, des femmes déguisées en mappemonde… Pas de quoi affoler les représentants des gouvernements cloisonnés dans le centre de conférences Riocentro.

Au Sommet des peuples, on est cool

Même ambiance au Sommet des peuples, lieu de rassemblement des ONG à Rio. Ce jeudi matin, on chantait, on dansait, on parlait de choses aussi diverses que l’agriculture biologique, le commerce équitable, l’homéopathie, les méfaits de la cigarette… Sous les tentes installées dans le parc Flamengo, pas d’animosité, pas d’énervement. On est cool, à la brésilienne. Et même parfois optimiste: «Les gens s’intéressent plus à l’environnement qu’il y a vingt ans, et c’est déjà une bonne chose, estime Yasmine, membre de Green Cross au Brésil. Et puis c’est facile de critiquer les négociations quand on n’a pas à mettre des centaines de gens d’accord.» «L’important c’est de faire changer les petites choses à notre niveau», pense pour sa part Tatiana, membre d’une association brésilienne qui organise des distributions de paniers de légumes bio.
«Ils négocient pour négocier et s’organisent pour ne pas s’entendre, c’est un sempiternel recommencement», pense Mustapha, journaliste sénégalais également membre d’une association d’aide aux pays en développement. D’après lui, les négociations sont jouées d’avance car «les délégués sont d’abord des individus faciles à corrompre». Sa collègue, Catherine, pense que ce sommet «n’est pas utile» et a été choquée par «toute l’énergie qui est utilisée au Riocentro pour parler d’économie verte.» «Le Riocentro est à deux heures d’ici, ce sont les VIP et les intérêts privés qui y sont, pas les peuples», conclut Mustapha.

jeudi 21 juin 2012

Sommet de Rio contre les dérèglements climatiques


RIO DE JANEIRO - Une foule colorée de milliers d'activistes contre Rio+20


RIO DE JANEIRO - Brandissant pancartes, ballons et tronçonneuses, des dizaines de milliers de manifestants du Sommet des peuples ont défilé mercredi dans la bonne humeur dans le centre-ville pour exiger une transformation radicale de l'économie, en marge de la conférence de l'ONU Rio+20.
Le visage peint en bleu, une femme vêtue en mappemonde pleure et demande de l'aide pour la Terre. Elle est enchaînée par un grand propriétaire terrien qui hurle "plus de viande pour les Etats-Unis !" tandis que son employé portant "un grand tablier ensanglanté où on lit "Mac Killer" et "Murder King" - en allusion aux deux chaînes de fast-food américaines McDonald et Burger King - poursuit un (faux) boeuf avec une hache.
Cette performance de l'ONG Révolution de la cuillère donne le ton à la "Marche mondiale des peuples" organisée par deux cents organisations de la société civile pour protester contre "l'économie verte" prônée au sommet de l'ONU sur le développement durable Rio+20. La conférence réunit une centaine de chefs d'Etat ou de gouvernement jusqu'à vendredi, à 4O km de là.
"Nous luttons pour changer les habitudes de consommation et contre les grands groupes alimentaires", déclare à l'AFP Mariana Terra, 23 ans, étudiante en Histoire, à l'initiative de cette performance.
Parti de la cathédrale Candelaria, le défilé multicolore qui réunit écologistes, travailleurs, fonctionnaires, militants noirs, homosexuels, Indiens, féministes, a parcouru au son des tambours et des sifflets l'avenue Rio Branco, l'artère centrale du centre-ville, jusqu'à la place Cinelandia, théâtre des manifestations historiques.
Selon la police, ils étaient entre 80.000 et 100.000 manifestants.
La pluie qui tombait par moment n'a pas découragé les militants qui "attendent très peu de Rio+20".
Un groupe de Xavantes d'Amazonie, le buste couvert de peinture rouge et noire, trottine en portant un gros tronc d'arbre sur les épaules, symbolisant l'un des jeux sportifs indigènes qu'ils souhaitent "transformer en jeux mondiaux". Plus de 1.600 Indiens participent au sommet des peuples et réclament la protection de leurs terres.
Non loin, un groupe de Sud-Coréens protestent contre l'énergie nucléaire et le sommet officiel derrière une banderole "Stop à la vie verte destinée à 1%", de la population.
"Nous demandons aux dirigeants mondiaux qui sont là de créer des politiques de développement durable, d'éradication de la pauvreté et de réduire les programmes et les armes nucléaires", a dit à l'AFP, Nam Boo Won, responsable d'un groupe de 21 ONG environnementales sud-coréennes.
Escorté par un char d'assaut de taille réelle construit avec des centaines de pains dans une favela de Rio pour demander au sommet de Rio+20 de combattre la violence et la faim, une danseuse de samba en paillettes dorées se déhanche frénétiquement au rythme des percussions.
L'ONG Terre des Hommes de soutien aux enfants pauvres a répondu à l'appel avec de nombreux jeunes d'Amérique du Sud, d'Asie, d'Afrique et d'Allemagne.
"On ne peut pas penser à une solution pour la planète sans écouter les jeunes. Il nous faut un défenseur des jeunes générations dans les organismes officiels", revendique la Bolivienne Alejandra Lopez, 19 ans.
Les écologistes sont partagés sur l'impact de ces marches qui provoquent d'énormes embouteillages dans la ville et contribuent à l'émission de gaz à effet de serre.
Le président du Jardin botanique de Rio, l'écologiste Liszt Viera, estime néanmoins que "cela fait partie du jeu, puisque la ville a accepté d'être le siège d'un grand événement".

lundi 18 juin 2012

Rencontres Internationales sur le dérèglement climatique


RIO DE JANEIRO - Rio+20: une foule multicolore se mobilise pour sauver la planète au Sommet des peuples

RIO DE JANEIRO - La musique lancinante de Hare Krishna résonne dans le parc du Flamengo de Rio, avec le Pain de sucre en toile de fond. Elle est soudain interrompue par des cris gutturaux: le cacique Raoni, menaçant, massue en main, annonce son arrivée au Sommet des peuples en tapant des pieds.
"Je suis encore en vie pour lutter contre les choses que l'homme blanc fait contre nous, contre la nature", lance d'une voix forte ce chef kayapo, 82 ans, le plus respecté du Brésil, devant une foule bigarrée.
Organisé par la société civile en marge de la conférence de l'Onu sur le développement durable, ce sommet s'est ouvert vendredi avec la participation de groupes religieux et des centaines d'activistes.
Indiens de tout le Brésil en peintures de guerre, adeptes du Candomblé (une religion afro-brésilienne) vêtus de blanc, fidèles de la religion d'inspiration hindoue Hare Krishna, aux longues robes safran, ne cessent d'arriver ainsi que des militants du monde entier. Quinze mille participants par jour sont attendus pour prendre part à plus de 600 activités et débats qui se dérouleront jusqu'au sommet officiel des chefs d'Etat du 20 au 22 à qui ils remettront un cahier de doléances.
"Je suis venue ici pour essayer de connaître des méthodes pour lutter contre le changement climatique, nous avons besoin de travailler hors du système et nous avons beaucoup à apprendre des indiens", a dit à l'AFP Erynne Gilpin, 23 ans, étudiante canadienne anglaise d'origine indigène, de la tribu Sautteux-Métis.
Graça, une porte-parole du Mouvement inter-religieux explique que le but de ce rassemblement est "de donner de la visibilité aux peuples et aux religions les plus vulnérables", rappelant qu'une grande marche contre l'intolérance religieuse aura lieu dimanche dans le quartier touristique d'Ipanema.
"Les éléments qui forment la planète sont la base du Candomblé: terre, air, eau et feu. C'est pourquoi nous sommes des défenseurs de l'environnement", déclare Renato de Obaluayê, prêtre de cette religion apportée d'Afrique par les esclaves noirs.
Le professeur d'économie H. M. Desarda de l'Université de Hyderabad (Inde) participera à une table ronde de ce sommet.
"Notre planète est menacée. L'ennemi numéro un de l'humanité est l'actuel style de vie stupide que nous menons", souligne ce professeur avant de citer le mahatma Gandhi: "Il y a assez de tout dans le monde pour satisfaire aux besoins de l'homme, mais pas assez pour assouvir son avidité".
Des indiens venus d'Amazonie pour la première fois, après deux ou trois jours de car, et parlant à peine le portugais, prennent en photo les yachts de la baie de Rio. Ils campent dans le Sambodrome de la ville, habituellement réservé aux luxueux défilés du carnaval. D'autres ont monté un village baptisé Cari-Oca, à 40 kilomètres de là. Au total 1.600 indigènes de divers pays sont attendus.
"Nous nous inquiétons de l'avenir de l'environnement. Nous voulons savoir ce que les gouvernements vont faire des peuples qui ont toujours protégé la forêt. Nous voulons des solutions économiques pour les produits que nous avons sur nos terres", déclare Irineu Baniwa, qui est venu de Sao Gabriel da Cachoeira (Amazonas) à la frontière du Venezuela.
Et d'ajouter: "Les pays développés continuent à polluer le monde. Comment vont-ils réduire leurs émissions de CO2?".
A Rio Centro, où se déroule la conférence officielle ministérielle, les négociations piétinent depuis mercredi car personne n'est prêt à financer ce développement durable en temps de crise.
Jose Wiliam de Souza, un responsable de l'Environnement de l'Etat du Ceará (nord-est), un des plus pauvres du Brésil, participe à la conférence officielle à Rio Centro. Mais il est venu à l'Aterro do Flamengo "observer ce que les peuples traditionnel font pour protéger l'environnement".
"Ici c'est le sentiment du peuple qui s'exprime. Ou bien la société civile s'implique ou on n'arrivera à rien. Rio Centro c'est l'institutionnel et le pouvoir de décision", commente-t-il.

jeudi 14 juin 2012

Sommet sur le dérèglement climatique...


Rio+20: Nicole Bricq aborde le sommet en étant «lucide et réaliste»


ENVIRONNEMENT - La ministre de l'Ecologie a présenté les engagements de la France pour le sommet des Nations unies à Rio la semaine prochaine...

Un «message très fort»: la présence à Rio, pour le sommet sur le développement durable des Nations unies, de François Hollande et des ministres de l’Ecologie et du Développement marque l'engagement de la France sur les enjeux environnementaux, a rappelé Nicole Bricq, ministre de l’Ecologie, lors d’une conférence de presse ce mercredi. Alors que peu de dirigeants européens se rendront au Brésil du 20 au 22 juin, la délégation française portera les objectifs de l’Union européenne et les siens dans les négociations sur l’économie verte et la gouvernance du développement durable.

Le Brésil veut un succès

Nicole Bricq s’est dite optimiste sur la création d’une organisation mondiale de l’environnement (OME), défendue par l’Europe. «L’Union africaine, le Chili, la Malaisie, le Pérou, le Cambodge» soutiennent cette idée a assuré la ministre, «et il est possible que la Chine suive du fait de ses intérêts commerciaux en Afrique et l’Inde peut bouger». «La position des pays émergents, ou émergés, sera déterminante», a rappelé Nicole Bricq. Parmi eux, le Brésil espère faire de Rio+20 un succès et presse les négociateurs de conclure leurs débats dès le 19 juin au soir, à la veille de l’arrivée des chefs d’Etats, afin d’éviter le syndrome de Copenhague où un texte inconsistant avait été adopté pendant la dernière nuit du sommet.
Nicole Bricq a soutenu l’idée de cette OME, «une agence des Nations unies basée en Afrique, qui piloterait la stratégie internationale avec un mandat politique clair.» La ministre a également défendu le concept d’économie verte, déjà vivement critiqué par les ONG. «Ce concept est soupçonné de servir les velléités de protectionnisme des pays développés, mais s’il reste encore quelques ambiguïtés, il faut faire avancer ce concept.» Nicole Bricq a ainsi assuré que la France veillerait à ce qu’un volet social incluant des conditions de travail décentes et un socle de protection sociale soit inclus dans la définition de l’économie verte. «Car on peut faire de l’économie verte en pratiquant le dumping social», a dénoncé la ministre. Les négociations avec les pays émergents risquent d’être musclées sur le sujet.

G20, Rio et Conseil européen, un enchaînement «cohérent»

«Quoi qu’il arrive, il y aura un après Rio», a conclu la ministre. «Le chemin est long et difficile mais il faut le commencer dès maintenant en étant lucide et réaliste», a-t-elle déclaré. Pour Nicole Bricq, l’enchaînement dans le calendrier du G20 au Mexique, du sommet de Rio et du Conseil européen permettra de «défendre la même cohérence, à savoir traiter les sujets environnementaux en trouvant des voies pour mobiliser les financements.» Selon elle, l’économie verte doit se traduire par un modèle de développement «le plus sobre possible» et les pays riches doivent «apporter la preuve qu’ils sont capables de faire des efforts», notamment en réduisant leur consommation d’énergie. Montrer l’exemple et prouver que l’environnement n’est pas un obstacle au développement sera la condition pour entraîner les pays en développement et émergents dans une croissance plus verte.

mercredi 6 juin 2012

La Journée de l' environnement...c'est tous les jours


Pourquoi on ne célébrera pas la journée mondiale de l'environnement

EVENEMENT - Ce 5 juin, c'est la journée mondiale de l'environnement. Vous ne le saviez pas? C'est normal...

Entre la journée mondiale sans tabac, la journée mondiale de sensibilisation à l’autisme ou la journée mondiale des toilettes, l’environnement se faufile le 5 juin pour sa journée à lui. Mondiale, certes, mais encore méconnue en France. Lancée par les Nations unies en 1972, cette journée est l’occasion pour chacun de montrer son engouement pour la défense de l’environnement, mais la participation de Gisèle Bündchen aux événements officiels ne suffit pas à motiver les foules. 20 Minutes vous donne quelques bonnes raisons de ne pas célébrer la Journée mondiale de l’environnement.

Y en a marre des journées mondiales

Le 8 mars, on a été gentil avec les filles, le 31 mai on a arrêté de fumer (pour 24 heures) et maintenant il faudrait en plus qu’on soit écolo. C’est beaucoup demander. Selon les calculs de francetv.fr, il y aurait 190 journées mondiales dans le calendrier: de la journée des pâtes à la journée de la ménopause, en passant par la journée de la plomberie et la journée sans Facebook, il y en a pour tous les goûts. Mais trop de journées peut tuer la journée.

J’ai pas d’idée

Pour la journée mondiale de l’environnement, les Nations unies tentent de «susciter des actions individuelles». Chacun peut inscrire son activité sur leur site et entrer ainsi dans la grande communauté des bienfaiteurs de la nature. Attention, l’excuse «je ne sais pas quoi faire» ne marche pas: les Nations unies donnent plein d’idées. «Des rassemblements, des excursions à vélo, des concerts écologiques, des concours de dissertation et de peinture dans les écoles, la plantation d’arbres, des campagnes de recyclage et de nettoyage, et bien plus encore.» Et si on prend un apéro au vin bio avec ses potes, ça passe?

Les journées mondiales, c’est que de la comm’

Evidemment, les journées mondiales sont surtout une occasion de faire parler d’une cause et de donner une visibilité aux entreprises, associations ou politiques qui se saisissent du sujet. A la rédaction planète de 20 Minutes, nous avons ainsi reçu pour cette journée mondiale de l’environnement quelques communiqués de presse bien pensés: «Pour la journée mondiale de l’environnement, Europe Ecologie-Les Verts rappelle l’importance de Rio +20», «A l'occasion de la journée mondiale de l'environnement, Les Amis de la Terre lancent une campagne pour dénoncer les dangers de la financiarisation de la nature» ou encore «En cette journée mondiale de l’environnement, le Barilla Center for Food & Nutrition alerte une nouvelle fois l’opinion publique sur les grands enjeux de demain en matière de développement durable et de préservation de l’environnement». On attend le communiqué de Barilla pour la journée des pâtes.

Pourquoi moi je devrais faire quelque chose alors que les autres…?

L’écologie a tendance à être moralisatrice, voire culpabilisante: triez vos déchets, ne laissez pas couler l’eau, éteignez la lumière, ne prenez pas votre voiture… Pourquoi moi je devrais me sacrifier alors que les industriels et les compagnies aériennes continuent à émettre des tonnes de CO2 en toute impunité? Les Nations unies ont une réponse: «Il est facile de blâmer les autres -les gouvernements parce qu’ils n’accordent pas une priorité suffisante aux politiques environnementales; les entreprises parce qu’elles augmentent les quantités d’émissions de gaz à effet de serre; les ONG parce qu’elles ne se prononcent pas assez résolument en faveur de l’environnement; et les individus parce qu’ils ne changent pas de comportement. La journée mondiale de l’environnement est néanmoins un jour où il faut mettre de côté nos différences et applaudir nos réalisations dans le domaine de la protection de l’environnement». Allez, un peu d’enthousiasme.

Parce que l’environnement, c’est tous les jours qu’on y pense

Evidemment, c’est la seule vraie bonne raison de ne pas célébrer cette journée mondiale. Car comme pour la Saint-Valentin ou la fête des mères, si une journée officielle est symbolique, ce sont les petits gestes et les petites attentions de tous les jours qui comptent. Vous êtes néanmoins autorisés à faire la bise aux lombrics qui peuplent votre composteur.
Audrey Chauvet

samedi 2 juin 2012

L' atome nuit à jamais...

Japon: La radioactivité empoisonne la vie quotidienne des Japonais

Avant le 11 mars 2011, la vie des ménagères japonaises était simple: elles se contentaient d'acheter des produits du terroir japonais et d'éviter les aliments importés de Chine, pour être totalement sûres de ne pas empoisonner la maisonnée. Mais l'accident nucléaire de Fukushima a remis en cause toutes les idées reçues dans ce pays jalousement attaché à la qualité de son riz, de son poisson ou de ses légumes, et obsédé par la sécurité alimentaire.
Malgré les contrôles et les garanties des producteurs comme des autorités, beaucoup de Japonais se méfient de la contamination radioactive, dont nul ne connaît l'ampleur exacte. Impossible, en effet, de contrôler la totalité des aliments mis sur le marché. Alors, certains n'hésitent pas à débourser plusieurs milliers de yens (plusieurs dizaines d'euros) en sortant du supermarché pour mesurer la radioactivité de leur panier de courses. Ce service est proposé par certaines municipalités. Des entreprises privées, comme Bekumiru (littéralement: «Voir les becquerels»), proposent quant à elles des appareils de mesure de la radioactivité en libre-service.

Tests de radioactivité

A Kashiwa, une ville des environs de Tokyo située à 200 km de la centrale mais où une radioactivité anormale a été mesurée en certains points, les locaux de cette entreprise ne désemplissent pas et le téléphone n'arrête pas de sonner. «Les gens qui habitent ici sont particulièrement inquiets», confirme le directeur, Motohiro Takamatsu. Les tests se font sur rendez-vous. Le personnel a suivi un mois de cours intensifs avec des experts. «Les clients viennent avec des légumes, un bol de riz, de l'eau ou tout autre aliment. Ils font eux-mêmes les mesures. Ca les rassure», souligne Motohiro Takamatsu.
Il suffit de placer un échantillon dans un récipient que l'on introduit ensuite dans un appareil muni d'un capteur, puis d'appuyer sur le bouton «start» d'un instrument qui ressemble à une caisse enregistreuse. Vingt minutes plus tard, le résultat s'affiche. Un document placé à côté de chaque machine renseigne sur les limites légales de becquerels par kilogramme pour les légumes, les condiments et les autres matières les plus courantes. «Beaucoup de gens viennent avec du riz, mais aussi de l'eau ou de la terre», précise Motohiro Takamatsu.

Regagner la confiance des consommateurs

«Je cultive des légumes dans la cour de l'école maternelle et comme les petits sont susceptibles de les manger, je viens ici régulièrement pour rassurer les parents. Forcément, ils sont inquiets», témoigne Ryotaka Iwasaki, qui en est à sa deuxième visite. «Si ce lieu n'existait pas, je serais ennuyé, cela coûterait sans doute trop cher de confier les tests à un organisme spécialisé». «Je suis venue mesurer le riz que je cultive. Il a été autorisé à la vente après des tests, mais je préfère vérifier par moi-même, pour être certaine», confie pour sa part la sexagénaire Mitsue Suzuki, une cultivatrice des environs.
Dans l'espoir de regagner la confiance, un important groupe de grande distribution nippon, Aeon, réalise ses propres tests sur la nourriture qu'il vend. Selon son directeur-général adjoint, Yasuhide Chikazawa, la fixation d'un «seuil de sécurité» par les autorités n'a pas de sens pour les consommateurs. «Seuls des produits présentant une radioactivité très faible au point d'en être indétectable pourront rivaliser avec leur homologues étrangers», justifie-t-il. La politique de «tolérance zéro» d'Aeon a d'abord rencontré l'opposition de producteurs des zones contaminées, précise Motohiro Chikazawa. «Mais ils ont finalement réalisé que c'était la meilleure façon de les protéger.»