Mexique: une communauté Zapotèque s'émancipe en protégeant la forêt
La forêt, c'est le trésor de la petite communauté d'Ixtlan de Juarez, sur les terres de la vieille ethnie des Zapotèques, près de Oaxaca, dans le sud-est du Mexique, où elle les aide à lutter à la fois contre la pauvreté et le réchauffement climatique.
Ce trésor, ils l'ont déjà défendu voici plus de vingt ans, contre une entreprise d'Etat qui leur en disputait la propriété.
Aujourd'hui qu'ils en vivent, et tandis que la conférence de l'ONU sur le réchauffement climatique est réunie à Cancun, à l'extrémité sud-est du pays, le gouvernement fédéral considère leur gestion de la forêt comme un modèle de réduction non seulement des gaz à effet de serre, mais aussi de la pauvreté.
Dans une grande scierie en bordure de la forêt de Oaxaca, des hommes et des femmes installent sur des tapis roulants les rondins à débiter.
"Prendre soin de la forêt est la priorité pour notre communauté, car c'est elle qui donne du travail à la plupart d'entre nous", explique Julio Garcia Gomez, aux commandes de la machinerie.
La communauté d'Ixtlan de Juarez est dirigée par une commission de 390 membres qui met ses décisions au voix pour gérer six entreprises liées au travail du bois, depuis le transport jusqu'à l'ébénisterie, et exploiter de petits "éco-hôtels". L'ensemble fournit 300 emplois directs et 2.000 autres dans une région de 5.000 habitants, et permet de réduire la dépendance de l'aide publique, attribuée sous forme de subventions.
Trente pour cent des quelque 600.000 dollars de bénéfice annuel sont consacrés à la protection de la forêt, y compris contre les incendies.
La communauté réinvestit encore 30% dans la marche de ses entreprises, et le reste au personnel, sous forme de retraites et de crédits à taux préférentiels.
Bien sûr, l'industrie du bois implique l'abattage d'arbres, mais la communauté le contrôle, de même qu'elle organise la plantation de milliers de nouvelles pousses chaque année, pour maintenir la couverture forestière sur une zone de 20.000 hectares.
Cette gestion communautaire de la forêt serait plus efficace que toute autre initiative contre la déforestation, y compris la délimitation de zones protégées, selon les experts forestiers internationaux.
"Les vieux arbres ne produisent plus d'oxygène, ne servent plus à piéger le carbone, pour cela il en faut des jeunes", explique le président de la commission d'Ixtlan de Juarez, Pedro Torres Perez.
Le carbone, on le retrouve dans l'ameublement...
En dépit de programmes très médiatisés de plantations d'arbres dont beaucoup ne survivent pas, et d'un recul de la déforestation depuis cinq ans, le Mexique perd encore des pans entiers de forêts, un déficit qui représente environ 10% de ses émissions de gaz à effet de serre.
Plus de 70% des forêts mexicaines appartiennent aux collectivités locales, mais moins de la moitié sont réellement gérées comme ici.
Pour être efficaces, de tels programmes supposent "des droits de propriété bien établis, une bonne gestion, transparente, et une politique de formation des compétences", explique Ivan Zuniga, du Conseil citoyen mexicain pour une exploitation forestière durable.
Ces conditions sont réunies à Ixtlan de Juarez, selon les spécialistes.
"Cela nous a déjà pris beaucoup de temps, pas mal de sacrifices et beaucoup de monde, le travail de beaucoup de monde", conclut Pedro Torres.
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