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jeudi 28 octobre 2010

Le lac Tchad en voie de disparition

Des boeufs se rafraîchissent aux abords du lac Tchad, le 8 décembre 2009

Des boeufs se rafraîchissent aux abords du lac Tchad, le 8 décembre 2009 Patrick Fort AFP/Archives

"Le lac Tchad est en train de disparaître", affirme Abdoulaye Tcharimi, agent du ministère de l'Environnement, qui est né et travaille à Bol, la principale ville sur les bords du lac Tchad, dont la taille a été divisée par dix en 50 ans, selon certains experts.

Le lac Tchad, dont le sud borde le Cameroun et le Nigeria, est au centre d'un forum international de vendredi à dimanche à N'Djamena rassemblant des dizaines de dirigeants, experts et spécialistes de l'environnement.

En 1960, la taille du lac était de 25.000 km2, aujourd'hui, elle avoisinerait 8.000 km2, voire 2.500 km2, selon différentes estimations. Les autorités et certains experts attribuent son rétrécissement au réchauffement climatique, alors que d'autres avancent des causes multiples et notamment sa surexploitation pour l'irrigation ou pour les besoins en eau des villes.

"Il y a une trentaine d’années les eaux du lac arrivaient jusqu’ici, où nous nous trouvons (devant la résidence du gouverneur de Bol), la ville était toute petite. Aujourd’hui la berge se trouve à plus d’un kilomètre de la résidence", se souvient avec amertume Abdoulaye Tcharimi.

Autour de Bol, des canaux et des bras d'eau asséchés témoignent aussi d'une époque où l'eau occupait un espace immensément plus grand. En s'éloignant des berges, on s'enfonce rapidement dans le sable et les paysages désertiques.

Si certains experts le font remonter à plus loin, Abdoulaye Tcharimi situe le rétrécissement du lac à la sécheresse de 1973.

Cette sécheresse qui a touché tout le pays "a été à l’origine du déplacement de populations de différentes régions du Tchad vers le lac, notamment des éleveurs à la recherche de pâturages pour leurs animaux", explique-t-il.

"Vers les années 1984-1985 le lac s’est encore plus asséché, laissant apparaître des îles. Cela a modifié la vie des habitants" qui se sont déplacés pour s'installer sur les îles, raconte M. Tcharimi.

Mécaniquement, la réduction du lac a réduit la surface des terres cultivables à son pourtour. "Quand il était plein, il y avait dans la région des vrais cultivateurs et des vrais éleveurs. Faute de terre cultivable, ils se sont transformés aujourd’hui en pêcheurs par la force de chose pour subvenir à leur besoin", explique M. Tcharimi.

L'afflux de population autour du lac, au Tchad, mais aussi au Nigeria et au Cameroun, a également contribué à son dépérissement, selon des experts. "Les pays voisins sont les plus grands utilisateurs de ses eaux, nous les Tchadiens nous les exploitons mal", se plaint M. Tcharimi.

"Le rétrécissement des eaux du lac a eu aussi pour conséquence la disparition de 150 espèces de poissons. Aujourd’hui il n'en existe plus qu'à peine une dizaine, et tous les autres animaux aquatiques ont disparu", souligne Tcharimi.

"En 2008, le gouvernement a pris une décision pour protéger non seulement l'ensemble de l'ichtyofaune, mais aussi et surtout pour pérenniser et rationaliser la production halieutique. C'est pourquoi nous avons interdit la pêche avec des filets à petites mailles", déclare Brahim Hamdan, délégué de l'Environnement pour la région du lac.

Mais les récentes pluies ont provoqué une montée conjoncturelle des eaux, rendant toute pêche impossible sans ces filets à petites mailles.

"Nous passons parfois 24 heures sur le lac à la recherche du poisson sans rien prendre", se plaint part Kayia Oumar, pêcheur d'origine malienne, habitant de l'île de Kinassorom.

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