Désastre des boues rouges en Hongrie : quels risques ?
Un million de mètres cube de boue rouge s'est déjà répandu dans les villages autour du site situé à 160 kilomètres de Budapest On déplore six morts et plus d'une centaine de blessés. Sur place, des habitants désertent les lieux. (Voir la vidéo)
Quels sont les risques ?
Sur place, les boues toxiques ont provoqué des brûlures et irritations des yeux. Comment évaluer leur risque réel sur la santé ? Pour le savoir, nous avons interrrogé Jacques Bureau, éco-toxicologue de l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris) :
« Il est fort probable que ces boues soient toxiques, même si nous n'avons pas de détails sur leur composition chimique ».
Dans les cas les plus graves, ces boues peuvent, outre les dégâts sur les sols, attaquer « les organes fonctionnels » de l'homme. L'association Robin des Bois précise que :
« Le cumul des métaux et minéraux fait des boues rouges un déchet toxique pour la faune aquatique, les animaux domestiques et d'élevage. »
Jacques Bureau ne veut pas s'avancer sur la dangerosité de la pollution en Hongrie, car :
« En plus de leur potentiel toxique, c'est surtout le degré d'exposition aux boues qui fait la dangerosité de ces résidus. »
D'où viennent ces « boues rouges » ?
La production d'aluminium se fait à partir de la bauxite, un minerai importé souvent des régions tropicales et subtropicales.
La première partie du processus de production, qui consiste à transformer la bauxite en alumine -ensuite transformée en aluminium- génère des résidus de boues.
Ainsi, pour une tonne d'aluminium produite, il faut compter trois tonnes de boue rouge. Selon L'UsineNouvelle.com, « ces résidus contiennent des métaux lourds ainsi que du cyanure et de l'arsenic ».
Mais, selon Jacques Bureau, « la composition des boues et leur toxicité peuvent varier en fonction de l'origine du minerai ».
Et en France ?
Il existe dans l'hexagone une seule usine de production d'alumine. Elle appartient à l'entreprise Rio Tinto Alcan et est située à Gardanne (Bouches-du-Rhône). Depuis 1967, ces boues rouges sont rejetées pour moitié en pleine mer et, pour moitié, stockées dans un bassin près de l'usine. Interrogé par Rue89, Alain Pavillon, directeur de l'usine de Gardanne, explique :
« Ces boues sont nettoyées et séchées, avant d'être stockées dans un bassin qui fonctionne en circuit fermé. Ce procédé permet de gagner de la place et surtout de limiter les impacts environnementaux ».
Un comité scientifique, créé en 1995 par décision du préfet et composé d'experts indépendants, surveille de près les impacts des 250 000 tonnes de boues annuelles rejetées en mer (Voir la carte du bassin de l'usine de Gardanne).
Les industriels ont beau dire qu'ils font tout pour minimiser les impacts, ils vont bientôt devoir obéir à une directive européenne : les rejets en mer seront interdits dès 2015, et le stockage dans les bassins de rétention, à partir de 2021.
Comment éviter le stockage des boues ?
Depuis dix ans, à Gardanne, une technologie permet de revaloriser les boues rouges. Nettoyées, elles sont transformées en « bauxaline », un matériau inerte réutilisé dans les secteurs des travaux publics, du bâtiment ou encore de l'horticulture.
Reste que ce type de procédé est rare en Europe. Et qu'en attendant qu'il se développe, « il n'y a pas de solution miracle », selon Jacques Bureau de l'Ineris, si ce n'est « renforcer la sécurisation des digues qui peuvent posséder des défaillances dans leur conception ».
Le directeur de Greenpeace-Hongrie, Zsolt Szegfalvi, estime que :
« la responsabilité de l'usine était claire, il est évident qu'ils entreposaient trop de boue dans les réservoirs. Sur des images par satellite la fissure était déjà visible sur la digue, un jour avant l'accident ».
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